L’effet miroir : quand mon animal me renvoie à mon histoire

Maladies & Santé - 8 minutes de lecture

L'effet miroir : Quand mon animal me renvoie à mon histoire...

Dr Sylvia Morand
Dr Sylvia Morand Vétérinaire

L’effet miroir en psychologie part du principe que les évènements et les situations de notre vie sont le reflet de notre état intérieur, de notre façon de penser, de percevoir ce qui nous entoure. Selon le professeur Anil Seth, (1) neurobiologiste : 

« Le cerveau combine les signaux sensoriels avec nos attentes et nos croyances antérieures (…). Ce que nous percevons, c’est la meilleure idée approximative possible, une supposition de ce qui se passe dans le monde qui nous entoure. Nous ne percevons pas passivement le monde, nous le créons activement. » 

Dans notre relation à l’animal, celui-ci devient le reflet de notre attitude plus ou moins consciente face à la vie, s’exprimant sur la même longueur d’onde. C’est quelque chose qui m’a été donné de constater à plusieurs reprises dans mon quotidien de vétérinaire. 

Alors mythe ou réalité ? Heureux hasard ou triste coïncidence ?  Sommes-nous véritablement connectés à notre animal ? Est-il connecté à nous ? 

Et si c’est réel : Comment ça marche ? Peuvent-ils réellement nous comprendre ?

Dans mon quotidien de vétérinaire la relation entre un animal et son gardien n’est plus à démontrer, elle fait partie intégrante de mes consultations. 

Cependant, plutôt que de parler d’effet miroir qui impliquerait que l’autre n’ait pas le moindre choix dans le fait de nous refléter, je préfère parler d’effet de résonnance

Singe regarde miroir reflet

Un peu de science (promis je fais court et simple) avant de rentrer dans le vif du sujet avec des exemples vécus. Chaque être vivant (homme ou animal) est constitué d’un assemblage d’atomes et génère en ce sens un champ électromagnétique, une fréquence, qui lui est propre. 

Lorsque deux champs électromagnétiques sont en présence l’un de l’autre : ils entrent en résonnance. 

Ce sont là des bases de physique simple mais qui peuvent, à mon sens, expliquer l’effet miroir. 

Les deux champs (ici l’homme et l’animal) vont s’accorder l’un par rapport à l’autre. Plus on y passe de temps plus on s’accorde, et plus l’autre nous devient « familier ». Si je subis un stress de forte amplitude émotionnelle, ou si je suis malade de façon chronique : mon corps réagit et sa composition chimique varie, que ce soit par les neurotransmetteurs (sérotonine/dopamine etc.) pour l’émotionnel, ou par un changement métabolique lors d’une maladie. 

Mon champ électromagnétique est perturbé en conséquence et l’autre partageant ma vie (animal ou humain) va s’en trouver affecté. 

N’avez-vous jamais senti simplement sans paroles que votre compagnon n’était « pas bien » ce jour-là ? 

Votre cerveau est un réseau géant qui ne fait qu’interpréter des signaux électriques en permanence, les champs électromagnétiques il connait ! 

Et il interprète et classe les informations en fonction de votre vécu/apprentissage et de ce qu’il a reçu comme background de l’espèce. 

Parmi la multitude de neurones dont il est constitué se trouvent les fameux neurones miroir… Ces neurones s’activent soit quand on fait un geste, soit quand on voit l’autre le faire. (2)

Notre cerveau réagit alors comme si nous avions réalisé ce geste nous même ! 

Ces neurones seraient la source de notre compassion envers l’autre, de notre capacité de se mettre à sa place. 

Ces neurones miroir existent également chez l’animal, c’est d’ailleurs la base du système d’apprentissage de choses nouvelles. (3) L’animal serait donc parfaitement capable également de se mettre dans nos baskets ! 

Je tiens cependant à préciser que ce n’est pas parce qu’on le peut qu’on est obligé de le faire. Je rencontre beaucoup de personnes qui d’emblée se culpabilisent « C’est de ma faute s’il est malade ».

Ce n’est pas parce que vous êtes sensible à la douleur des autres que vous êtes pour autant forcé de tomber malade pour eux ! 

Si cela arrive c’est qu’il y avait déjà une fragilité du même ordre chez vous.

Chat regarde reflet miroir

Concrètement qu’est-ce que ça peut donner en consultation ?

Le cas d'Eloa*

Ma première rencontre marquante de l’effet miroir a été avec un Jack Russel, Eola*. 

Une jeune chienne de 3 ans est arrivée sur ma table de consultation à priori parfaitement équilibrée et pleine d’entrain comme savent très bien l’être les Jacks ! 

J’écoute Sophie, sa gardienne, me parler de ses troubles du comportement qui se manifestent surtout le soir ; dès que Sophie se pose, Eola se met à tourner en rond, n’arrive plus à s’arrêter, elle tourne, tourne, tourne…

Jack russel

Je pose les mains sur la chienne et prends contact avec elle, la sensation est immédiate, tout est à 300 à l’heure et il faut une échappatoire à ce débordement. 

Les points poumons en médecine chinoise réagissent également montrant une tristesse et une mélancolie sous-jacente suite à une séparation. 

Comme dans toutes mes consultations, je verbalise ce que je trouve et là, c’est Sophie qui fond en larmes en m’expliquant qu’elle s’est séparée de son conjoint et qu’elle a du mal à passer à la suite et que ça tourne en rond dans sa tête… 

Bingo la chienne se relâche sous mes mains, le message est passé. Qu’est ce qui vient d’arriver ? 

Je commence à lui expliquer que, non, sa chienne n’est pas en train de prendre sur elle le problème et qu’elle ne se rend pas malade pour elle, du moins pas directement. 

La verbalisation du problème permet une prise de conscience. Une fois le problème mis en évidence, on peut lui trouver une solution. En revanche, tant qu’on ne sait pas à quoi on a à faire, ou qu’on refuse de le regarder en face, c’est compliqué de trouver une solution ! 

Le ressenti de la chienne à ce moment-là n’est pas celui de la séparation de madame ou de son travail ou autre… simplement l’anxiété de voir une personne qu’elle aime malheureuse, elle sent bien que quelque chose ne va pas. 

A ce moment-là, sa technique à elle, c’est tout simplement sa technique de chien :

« Viens regarde, viens jouer avec moi, la vie est belle, pourquoi tu ne le vois pas, pourquoi tu ne veux pas jouer, allez… ». 

Bien sûr, cet exemple n’est pas universel ; chaque animal a sa propre personnalité et réagira différemment.

Toujours est-il que j’ai aidé la chienne en phytothérapie, sa gardienne a pris le même chemin et s’est faite aidée en phyto également. En un mois, le problème qui durait depuis un an et avait résisté aux autres traitements a été résolu. 

Elles sont repassées me voir le sourire aux lèvres, toutes deux bien dans leurs pattes !

Chat


Le cas de Léo*

Par moment, cet effet va plus loin que le trouble comportemental et vient toucher au physique. Les exemples sont multiples, je vais en choisir un qui m’a marqué. 

Il s’agit cette fois d’un chat. C’est Léo qui est arrivé chez moi pour des problèmes de peau. 

Catégorisé comme allergique, il est sous cortisone régulièrement et ses gardiens cherchent à sortir de ce cercle. 

Il s’arrache tellement les poils qu’il est à moitié nu, et ne supporte plus le contact de la main et les caresses. Ce qui désole bien sûr, ses gardiens. 

Léo a un historique d’abandon, il a été adopté à la SPA avec suspicion de maltraitance. 

Le rapport avec sa pathologie est pour moi criant :

« Je ne supporte pas qu’on me touche/que cela me touche. »

La peur viscérale d’être à nouveau abandonné et maltraité s’exprime par le corps de Léo qui a mis au point un système pour que l’on ne puisse plus l’approcher. 

L’automutilation revient à s’amputer d’une part de soi qui nous dérange. Je parle aussi de réaction épidermique aux autres. Et en effet, Léo ne tolère pas les autres.

Dans l’effet miroir, un des deux gardiens est concerné en particulier, Cédric a bloqué en masse son émotionnel comme nous savons si bien le faire, afin de se protéger et de ne plus être blessé

Ce qui consiste bien en une forme d’automutilation également même si non visible… quoique, il a lui-même de l’eczéma par crise ! 

Alors que je lui explique tout ça au niveau du chat, il arrive seul à la conclusion que c’est tout comme lui… 

Il m’a fallu 2 séances d’acupuncture sur Léo pour rééquilibrer le corps, l’amélioration a été immédiate dès la première séance. Cette prise de conscience sur la façon dont le corps peut réagir à notre psyché a aussi transformé Cédric. 

Cela a été un travail en tandem qui leur a permis à tous les deux de prendre un nouveau départ… On ne se rencontre pas par hasard !

Vous l’aurez compris l’effet miroir/résonnance est loin d’être si simple qu’il y parait, il reflète la complexité de nos liens au vivant et de notre interaction mutuelle les uns avec les autres quelle que soit l’espèce. 

L’élan de notre cœur lors de l’adoption nous conduit toujours vers l’animal avec lequel on s’accorde le plus (entendez avec lequel nous entrons le plus en résonnance). 

C’est valable pour nos compagnons animaux comme humains. D’où ce fameux effet miroir. 

Miroir plante verte


En résumé :

  • Il peut être intéressant lorsque l’on observe un comportement ou une pathologie qui nous parle sur notre animal de s’interroger sur un lien éventuel entre lui et nous.
  • Si vous constatez ce lien, pas de culpabilité ! L’animal n’est pas qu’une « éponge » comme je peux souvent l’entendre, il a sa propre histoire qui entre en résonnance avec la vôtre.
  • Il n’y a dans ce jeu ni victime ni coupable, simplement une occasion de se connaître un peu plus.

*Pour une question de respect du secret professionnel, les noms ont bien entendu été changés.

Sources

  1. Anil Seth - 3 minutes pour comprendre les 50 plus grand mécanismes du cerveau, Ed le courrier du livre
  2. Anil Seth - 3 minutes pour comprendre les 50 plus grand mécanismes du cerveau, Ed le courrier du livre
  3. Richard Cook, Geoffrey Bird, Caroline Catmur, Clare Press, Cecilia Heyes - Mirror Neurons: From Origin to Function - Behav Brain Sci. 2014 Apr;37(2):177-92. 

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